UNION EUROPÉENNE
Le principe du pays d'origine sera maintenu dans
le projet Bolkestein
José
Manuel Barroso veut la libéralisation des services
Marie-Laetitia Bonavita
[15
mars 2005]
A onze semaines du référendum en France sur la Constitution européenne, les partisans du oui se seraient bien passés de la déclaration qu'a faite hier José Manuel Barroso. Le président de la Commission européenne affirme qu'il «n'abandonnera pas le principe du pays d'origine» contenu dans la directive sur les services, dite directive Bolkestein. Ce principe permet à un prestataire de services d'opérer à travers l'Union en appliquant la loi de son pays d'origine et non celle du pays où il opère. Il est au coeur de la controverse sur la libéralisation des services dans l'Union.
Plusieurs pays, dont la France, l'Allemagne ou encore la Belgique accusent ce projet, rédigé par l'ancien commissaire néerlandais Frits Bolkestein, d'ouvrir la voie au «dumping social», notamment de la part des nouveaux pays adhérents où la protection sociale est moindre. En clair, ils craignent qu'un plombier polonais puisse venir travailler en France avec le salaire et la protection sociale de son pays.
Cette défiance à l'encontre des pays de l'Est n'est pas du goût du président de la Commission. Il y voit une forme de protectionnisme. «Après l'élargissement, certains sont réticents à accepter la libre circulation des personnes et des services», a-t-il lancé, ajoutant : «Certains pensent que la Commission est là pour protéger les quinze membres anciens contre les nouveaux membres, ce n'est pas le cas, elle est là pour protéger l'intérêt général de l'Europe.»
Barroso a ensuite rappelé que la libre circulation des services à travers l'Union était, avec celle des biens, des capitaux et des hommes, une des «quatre libertés» inscrites depuis 1957 à l'article 3 du traité de Rome fondateur de la construction européenne. En fait, a-t-il dit, «il y a 25 marchés de services dans l'Union européenne». La Commission recense aujourd'hui pas moins de 91 barrières aux échanges transfrontaliers de services. Résultat : «Le niveau des échanges intra-européens de services n'a pas du tout augmenté depuis 1992.» Dans le même temps, la création du marché unique des produits a fait progresser leur commerce d'un tiers, augmentant de 1,8% chaque année le produit intérieur brut communautaire.
Citant une récente étude danoise, le président de la Commission affirme que la libéralisation totale des services pourrait apporter un bénéfice de 37 milliards d'euros aux consommateurs et producteurs européens. Certes, l'emploi souffrirait dans certains secteurs aujourd'hui protégés de la concurrence mais, globalement, l'Union gagnerait à terme quelque 600 000 emplois.
Selon Barroso, la libéralisation aurait un impact sur les coûts : d'une part, une baisse des prix des services évaluée à 7,2% en moyenne dans les professions réglementées (les plus opposées à cette libéralisation), d'autre part, une hausse du salaire réel dans l'Union de 0,4%. «Ce sont des gains concrets dont tout le monde bénéficierait. Je ne demanderai pas d'excuses pour essayer de les réaliser», a poursuivi le président de la Commission.
Ces arguments ne seront sans doute pas suffisants pour infléchir la position des députés français, majoritairement hostiles. Aujourd'hui, les élus doivent de réunir pour voter une proposition de résolution demandant le réexamen du projet de directive