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Réaction à l'intervention de Chirac

 

On le sentait confusément le soir de l’émission, les sondages sont venus confirmer la première impression des téléspectateurs : Chirac n’a pas convaincu ! La campagne, argumentée, des partisans du NON face aux généralités avancées par ceux d’en face porterait-elle ses fruits et les Français réclameraient-ils autre chose que des affirmations sans démonstrations ?

Discourir longuement de la défense européenne, du futur ministre des affaires étrangères européen, de la Turquie (bien sûr) sans dire que la plupart des pays européens (19 sur 25) sont membres de l’OTAN représente un véritable tour de force.

Omettre de rappeler l’article I‑41 du traité constitutionnel qui reconnaît que l’OTAN « reste, pour ces Etats, le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en œuvre » et répéter à l’envi : « N’ayez pas peur ! », « L’Union fait la force ! » c’est, pour rester charitable, faire preuve de légèreté intellectuelle.

Citer l’égalité hommes /  femmes comme démonstration de l’affirmation claire de nos valeurs par le texte constitutionnel, c’est … trop ! Rappelons que nous devons à l’Europe, au nom de l’égalité entre les sexes, le travail de nuit des femmes ; que le traité accorde le droit de se marier mais pas celui de divorcer ou celui de choisir ses maternités (ces problèmes étant régis par les législations nationales, il n’y a pas de solidarité avec les européennes qui n’ont pas le droit à l’avortement). Rappelons enfin que l’opposition d’opérette des députés du PSE a fait long feu face aux lobbies des assureurs : les contrats de santé sont plus chers pour les femmes que pour les hommes au motif que ces dernières sont potentiellement plus consommatrices de produits de santé (Directive 2004/113/CE).

Ce ne sont là que quelques exemples des omissions et incantations du Chef de l’Etat au cours de cette soirée durant laquelle il a tenté de raviver les couleurs du OUI ; à chaud, on aurait pu dire : « bravo l’artiste ! » puisque aucun de ses interlocuteur n’a véritablement été en mesure de le pousser dans ses derniers retranchements. Pourtant, très vite on se ravisait : Jacques Chirac n’avait pas réussi à apaiser les craintes. Le Président a eu beau répéter que la précarité, le chômage « n’avaient rien à voir avec le traité constitutionnel », Bolkestein, les délocalisations et autres problèmes liés aux différences de niveaux de protection sociale entre Etats membres se sont à plusieurs reprises invités dans le débat.

Quand l’artiste descend dans l’arène populaire, il souffle un vent d’incompréhension ! Malgré les injonctions du professeur Chirac, nous continuerons à qualifier ce texte de libéral et si le NON l’emporte, ce sera l’honneur de la France que d’être le « mouton noir », non pas de l’Europe mais de tous les technocrates libéraux ! Alors « n’ayez pas peur », votez NON !

 

Aimée Gourdol

Secrétaire nationale aux droits des femmes.